Nous avons mis en ligne 86 lettres adressées par Séguier au médecin Giovanni Bianchi (1693-1775) de Rimini, également connu dans le monde savant sous son nom latin de Janus Plancus. À celles-ci s’ajoutent trois billets que Séguier reçoit de marchands et qu’il fait suivre à son correspondant. L’ensemble de ces documents fait partie de la section “Lettere autografe al Dott. Giovanni Bianchi” du Fondo Gambetti de la Biblioteca Gambalunga de Rimini (fonds constitué par le religieux Zefirino Gambetti et acheté en 1870 par la municipalité de Rimini). Il s’agit d’une correspondance abondante à l’échelle des archives Séguier, et l’une des rares dont on conserve les deux parties : les 70 lettres envoyées par Bianchi à Séguier sont conservées à la Bibliothèque Carré d’Art de Nîmes et sont en attente d’édition.

La correspondance s’étend sur la période 1739-1770 ; l’entrée en communication revient à Bianchi, qui en juillet 1739 contacte Séguier en le remerciant d’avoir remis des livres au médecin Antonio Leprotti à Rome. 92 % des échanges se concentrent entre 1739 et 1755 et se déroulent, à quelques exceptions près, entre les villes de Rimini et de Vérone, où Séguier réside alors aux côtés de Scipione Maffei. Les contacts se font plus rares après le décès de Maffei (1755) et le retour de Séguier en France. Celui-ci joint des objets à quatorze de ses 86 lettres: il s’agit dans la majorité des cas d’autres documents, tels que livres, billets, notices bibliographiques et une lettre, mais également des graines, un sceau en cire, un fossile.
La correspondance concerne surtout les sciences naturelles (la paléontologie et la botanique en particulier), les antiquités (Bianchi aime et pratique l’épigraphie) et la médecine (Séguier s’intéresse aux propriétés thérapeutiques des plantes).
Ces échanges documentent les dynamiques de diffusion des informations bibliographiques et des ouvrages dans l’Europe savante du XVIIIe siècle. Bianchi, en particulier, bénéficie de l’étendue européenne du réseau du Nîmois pour se renseigner sur l’activité érudite du continent (non seulement la France et le monde francophone, mais aussi l’aire germanique, la Grande-Bretagne, les Pays-Bas et la Suède), ainsi que pour assurer à ses ouvrages une visibilité au-delà des Alpes. Le plus important de ses travaux de tératologie, l’épître De monstris (1749), est envoyé en 1750 par l’intermédiaire de Séguier à Zurich au botaniste et mathématicien Johannes Gesner, à Vienne au médecin Gerard Van Swieten, à Jan Frederik Gronovius à Leyden, à Paris à Camille Falconet, à Montpellier à Louis-Guillaume Bon et en Angleterre au médecin Richard Mead. Deux ans plus tard, Séguier fait parvenir à Gesner une copie de la dissertation De’ vescicatorj (1746) publiée par Bianchi, avec l’invitation à en faire suivre une copie à Göttingen, pour Albrecht von Haller.
Émergent ainsi, de ces lettres, les mécanismes de la circulation matérielle, du commerce et de l’échange des livres à travers des circuits formels et informels, aussi bien que le rôle des protagonistes d’une telle circulation : d’un côté les libraires et les marchands-banquiers, de l’autre côté les voyageurs, en particulier les pèlerins et les religieux.

Pour en savoir plus : www.seguier.org